De Sangatte au Blanc-Nez

En quittant Sangatte en direction du Cap Blanc-Nez, il faut s’apprêter à assister à un événement particulier : la naissance des falaises les plus septentrionales de France (il n’y en a d’ailleurs aucune depuis le Danemark…).
Et de surcroît, ces falaises sont des plus remarquables, puisqu’on chemine déjà le long du cap Blanc-Nez, classé « Grand site national ».
Grande beauté. Grand angle… Grand virage en direction du Sud… Bref, on change de ton, résolument, presque brutalement, entre le plat pays des moëres, des dunes et polders marquant les plaines maritimes de la Mer du nord, d’un côté et les hauteurs des collines de l’Artois échouées là, de l’autre.

 

A41-150413SangatteBlancNez22En cette fin de journée ensoleillée, l’absence de vent donne des allures de canyon  à cette première partie du cap teintée d’argile et reflétant son image sur le sable saturé d’eau.

Histoire et sédiments 

La falaise est d’abord un livre ouvert sur l’histoire géologique du lieu. La craie, ici dominante, parfois jaunâtre et parsemée de rognons de silex et de fossiles, a été patiemment formée pendant le Crétacé. Car 1000 ans sont nécessaires pour obtenir 2 cm d’épaisseur de cette  roche sédimentaire résultant de l’accumulation persévérante d’algues microscopiques.

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Il y a bien longtemps, tout était couvert d’eau. Puis découvert. Puis recouvert. Puis découvert encore. Ce qu’on appelle le détroit du pas de Calais séparant l’actuelle Angleterre du reste de l’Europe date d’à peine plus de 500 000 ans. Avant, tout était relié. Un brusque effondrement de terrain entre des failles en est à l’origine. La mer, pendant la fonte des glaciers, fit son affaire d’ouvrir le Channel voici  8500 ans, pour atteindre depuis seulement 5000 ans  la forme qu’on lui connait.

Matière en érosion

L’érosion du trait de côte concerne cette partie du littoral, bien que le calcaire résiste mieux aux assauts des éléments que l’argile, les marnes et sables présentes en d’autres endroits. Selon les lieux, la falaise s’érode plus ou moins rapidement et pas toujours régulièrement : environ 20 cm par an dans le secteur nord, côté Sangatte ; entre 5 et 85 cm par an sur le cap même… La mer sape la base, mais l’eau s’infiltre au dessus et creuse des failles, qui s’élargissent alors sous l’action du gel. Tout dépend donc de la force des flots, de la pluviométrie et des températures du moment, autant d’aléas qui ne permettent pas de constater une érosion homogène du trait.
D’importants éboulements ont eu lieu en 1998 et en 2000. Depuis, le cap est équipé de sondes et d’appareils de mesure permettant de mieux comprendre les phénomènes et les prévenir autant que possible.

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L’érosion est en tout cas indiscutable. La situation précaire de certaines constructions militaires en témoigne. La déambulation à proximité des falaises est dangereuse et pas seulement qu’en hiver, comme on le pense parfois.
Il faut aussi savoir que l’évolution sur cette partie offre peu d’option de survie au marcheur étourdi à marée haute. Sur plusieurs kilomètres, la paroi n’offre aucun moyen de l’escalader pas plus qu’il n’existe d’accès aménagé pour fuir l’estran recouvert par la mer.

Géant !

Le site reste quand même un merveilleux site de promenade et de découverte d’oiseaux nicheurs. De vieux pêcheurs y tendent encore des filets pour attraper les poissons déambulant au gré de la marée. Quelques parapentistes profitent de la hauteur des falaises  pour accrocher la voile aux courants ascendants. Mais la marche reste le meilleur moyen de profiter de cette partie littorale limpide et flamboyante sitôt que le soleil en baigne les parois.

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Le soir tombe. On aperçoit au loin le cap Griz-Nez… Alors que nous n’avons pas encore passé le blanc dont nous n’avons pas tout à fait fini de parler.

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La prochaine étape permettra en effet de prendre un peu de hauteur. Cap sur le cran d’Escalles et sur le sommet du Blanc-Nez !

Renseignements utiles

La promenade est exquise, surtout dans l’après midi et en soirée, falaises baignées par le soleil. Sable ferme, pas de cours d’eau infranchissable. Il est toutefois conseillé de ne pas s’approcher de la falaise, surtout s’il a été constaté que vous n’étiez pas en veine depuis le début de la journée.
Des bottes peuvent être conseillées. Je ne les ai jamais trouvées indispensables sur cette portion du littoral. En revanche il est fortement déconseillé de s’engager 3 heures après la marée montante. Le risque de se voir coincé en route – et de périr- est réel.

• Pour les amateurs de géologie voir ici et ici

 

 

8 commentaires

  1. De plus en plus magnifique …
    c’est un régal toujours plus grand que la découverte de ces paysages regardés avec tellement de sensibilité, d’amour et de respect de la nature
    merci pour ces plaisirs renouvelés …

  2. il n’y a pas que la roche qui est en bouleversement permanent… ce que procurent les photos et les textes accrochés à ces parois, c’est aussi un bouleversement permanent. Biz. Franck

  3. Simplement, tu me permets de me rendre compte, à travers ces photos qui dénote d’un professionnalisme de haut niveau, qu’à l’autre bout du monde, il a encore des merveilles de la nature

    1. Merci Félix. Je ne dirais pas que mes photos sont pros. Il doit y avoir des tas de trucs qui ne vont pas pour être considérées comme telles. Tout se fait à main levée en marchant. Aucune pause, peu de matériel. Pas trop de temps en chemin pour  » rechercher la vue ». Mais elles me plaisent et la nature m’aide beaucoup à satisfaire un travail de collection honnête proche de la perception du réel qui m’a été donné de contempler. Et c’est déjà pas mal pour moi ! En tout cas je suis content que cela te plaise et que tu puisses ainsi découvrir notre littoral.

      1. Comme tu le dis déjà, même si ce n’est pas pro, c’est quand même proche de la perfection. Et cela suscite l’envie de visite. J’espère que je la ferai un jour

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